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Les mots du dimanche

Par Michelle Courchesne

Cassure

Glace frêle cachée

Le cours de ma vie d'hiver

La marche détourne son but

 

Deux mois sans écrire ici. Je n'avais pas le choix: mon poignet gauche s'est brisé. Le radius n'a pas tenu le coup suite à la chute sur une plaque de glace que la fine couche de neige dissimulait.


Je marchais près de la rivière. Le froid doucereux de ce janvier trop clément invitait à la promenade. Des projets de poulet au four s'élaboraient dans mon imagination. Bouffe de réconfort. J'avais hâte de voir la cascade que forme le flot de l'eau, sous la passerelle. Je ne regardais plus où je mettais le pied, rendue confiante par tous ces trottoirs dégagés que j'avais parcourus. Je suis tombée, comme une surprise, comme une gifle soudaine, comme une jambette dans la cour de récréation.


Par terre dans l'allée longeant la rivière, estomaquée, je ne comprenais que la douleur. Je ne savais pas que le corps pouvait avoir si mal.


Grâce à deux passantes anges gardiennes, j'ai été transportée en ambulance à l'hôpital le plus près. Je savais qu'on ne peut rien prévoir, cette fois, je le vivais.





Il est d'autres surprises, plus graves, plus lourdes, plus dévastatrices. La maladie, la mort, la guerre. Je m'en sors finalement assez bien. Je suis passée entre les mains habiles d'un orthopédiste et une physiothérapeute s'occupe de moi. Je dois faire mes exercices et, si tout va bien, la flexibilité et la force devraient revenir.





Sans doute vivons nous toutes et tous des accidents, des revers, des batailles livrées avec des êtres chers, des collègues ou avec la vie, imprévues, douloureuses. Un vieux sage de ma connaissance ne cesse de répéter: "Dire oui à ce qui est." Dire oui à la chute. Dire oui à la douleur. Dire oui à la convalescence. Dire oui à ce qui peut être guéri et ce qui ne le peut pas.





Un mois après être tombée, armée de mon attelle, j'ai rendu hommage à cette extraordinaire collègue qui a croisé une plaque de glace autrement plus ravageuse, une dont on ne revient pas. Des centaines de personnes se sont réunies, collègues, élèves et leurs parents pour une soirée où la joie de se revoir se mêlait à la peine de lui dire au revoir, pour toujours. Dans mes mots tout simples qu'il m'a été si difficile de lui écrire, un moment de Grâce s'est créé, une communion s'est déroulée pendant que les larmes coulaient.


L'Amour prends plusieurs formes.


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